Récemment interpellée par les publications du collectif féministe de l’Université de Liège et par le collectif Et ta sœur actif sur Instagram, je me suis rendue compte que sur les 48 artistes programmés en juillet 2022, il n’y avait que 2 artistes féminines et un.e artiste non binaire. Soit un taux dramatique de 4 %.
UPDATE : à la date du 19 avril, la programmation intègre 7 femmes et une artiste non binaire sur 83 artistes, soit 8 % d’artistes féminines!
Cette non présence d’artistes féminines est bien le signe que l’équipe des Ardentes n’est pas assez sensibilisée sur la thématique de l’invisibilisation des femmes dans le secteur des musiques en général, et des musiques urbaines en particulier, alors que le festival se revendique un acteur incontournable des musiques urbaines en Belgique, ciblant volontairement un public jeune.
Une telle programmation laisse à penser qu’il n’y a pas ou peu de femmes actives dans les musiques urbaines… Et c’est là tout le problème. c’est FAUX, ARCHI FAUX.
Certes, il faut reconnaitre qu’il est plus difficile de programmer des femmes artistes qui font du métal ou des musiques urbaines, c’est la raison pour laquelle la notion de quotas est inopérante à mes yeux. Toutefois, programmer 2 artistes féminines sur 48, c’est insuffisant au regard des femmes artistes présentes dans le secteur des musiques urbaines … et qui tournent sur la période.
Pour la démonstration et pour ne pas être accusée de comparer ce qui n’est pas comparable, j’ai regardé les lineups 2022 des festivals européens spécialisés en hip hop et musiques urbaines :
Splash ! Festival en Allemagne : 18 artistes féminines sur 72 artistes programmés, soit 25 %;
Wireless Festival au Royaume Uni : 14 artistes féminines sur 35 artistes programmés, soit 40%;
l’Openair Frauenfeld en Suisse : 15 artistes féminines sur 80 artistes programmés, soit 19%;
le WooHa! Festival en Norvège : 8 artistes féminines sur 49 artistes programmés, soit 16%.
Pour joindre l’information utile à l’agréable, je joins une playlist réalisée au départ des programmation 2022 des festivals précités afin de promouvoir toutes les artistes féminines et urbaines qui tournent en 2022 et qui auraient pu être à l’affiche du festival : Little Simz, Flo Milli, BIA, City Girls, Ivorian Doll, Rico Nasty, Kalis Uchi, Jhéné Aiko, JUICE MENACE, Sheensea, Snoh Aalegra, Shaybo, ENNY, Doja Cat, Miraa Bae, Ms Banks, et encore beaucoup d’autres…
C’est en regardant ce que font les concurrents du festival les Ardentes qu’on peut se rendre compte que le nombre d’artistes féminines auraient pu être plus important, qu’ils ne sont pas victimes de la fatalité mais qu’au contraire, cela témoigne du fait que la thématique du genre ne leur explose pas au visage, qu’ils sont contents, voire fiers de proposer une telle affiche, que cela ne les dérange finalement pas tant que cela.
D’autres secteurs le savent et se mobilisent chaque jour pour lutter contre les biais de genre, les universités par exemple. On sait aujourd’hui que pour qu’il y ait des femmes ingénieures astronautes, il faut promouvoir les femmes qui vont dans l’espace. C’est la même chose quand on programme un festival Hip Hop, on peut créer des modèles, mettre en avant des artistes et finalement, promouvoir un projet de société plus inclusif pour une jeunesse urbaine, moderne et post raciale.
Dans sa note d’intention, Scivias, qui est une plateforme pour un secteur musical plus inclusif en Fédération Wallonie-Bruxelles explique qu’ au sein du secteur de la musique, les femmes et personnes s’identifiant comme femmes subissent sans doute l’invisibilisation la plus manifeste. Elles sont sous-représentées en nombre, mais également moins présentes aux postes décisionnaires, ceux-là mêmes qui permettraient de transformer les représentations et de mettre fin aux discriminations. Les inégalités de genre se conjuguent cependant souvent à d’autres discriminations, et Scivias affirme qu’une meilleure représentation des femmes va de paire avec une plus grande représentation des personnes non-binaires, transgenres, discriminées du fait de leur âge, de leur classe, de leur race, de leur handicap, de leur orientation sexuelle et de la multiplicité des dominations existantes.”
A cet égard, Scivias propose aux opérateurs culturels de signer leur charte visant à informer, sensibiliser et agir afin de rendre le secteur musical plus inclusif. Scivias propose tout un ensemble de ressources aux opérateurs pour sensibiliser à l’inclusivité au sein des équipes. Malheureusement, les Ardentes ne sont pas signataires de la charte.
https://scivias.be/charte/